Au Ghana, l’un des plus grands producteurs d’or au monde, l’essor de l’orpaillage illégal — connu sous le nom de galamsey — menace l’environnement et la vie des communautés locales.
Dans un contexte économique difficile, marqué par un chômage endémique et un affaiblissement du pouvoir d’achat, des milliers de Ghanéens se tournent vers cette activité clandestine, perçue comme l’un des rares moyens rapides de subsistance. Mais cette quête d’or a un prix. Les autorités et les ONG alertent sur la contamination des rivières et des sols par le mercure et le cyanure, utilisés pour extraire le métal précieux. La rivière Ankobra, autrefois source de vie, coule désormais grise et trouble.
« Autrefois, nous avions différentes variétés de poissons, mais l’eau est maintenant polluée », déplore Benjamin Yankey, pêcheur local.
Jema, un Village Debout
Face à cette dégradation, certaines communautés ont choisi la résistance.
À Jema, village d’environ 15 000 habitants, la lutte a commencé en 2015 avec un arrêté coutumier interdisant toute exploitation minière sur les terres communautaires.
Pour faire respecter cette interdiction, les habitants ont fondé la Jema Anti-Galamsey Advocacy (JAGA), une brigade citoyenne composée de quatorze volontaires.
Soutenue par le prêtre catholique Joseph Kwame Blay, la JAGA s’est imposée comme un modèle d’engagement local.
« Les habitants de Jema considèrent cette lutte comme un héritage. C’est devenu notre devise : Jema, no galamsey », explique le religieux avec fierté.
Les membres de la brigade patrouillent dans la réserve forestière de Jema, surveillant les cours d’eau, traquant les campements illégaux et signalant toute activité suspecte. En cas de flagrant délit, les suspects sont remis à la police, conformément aux lois autorisant les arrestations citoyennes.
Mais cette mobilisation n’est pas sans danger. « Des gens menacent nos vies parce qu’ils pensent que nous les privons de leur travail », confie Patrick Fome, président de la JAGA.
Résister pour l’Avenir
Malgré les menaces, les résultats sont visibles : les cours d’eau de Jema figurent parmi les plus propres du pays.
Cette réussite témoigne du pouvoir de la mobilisation citoyenne, même dans un contexte difficile où près de 39 % des jeunes sont sans emploi.
Beaucoup voient encore dans le galamsey une solution économique, ce qui rend la lutte d’autant plus complexe à étendre à l’échelle nationale.
Selon le ministère des Terres et des Ressources naturelles, des mineurs illégaux sont actifs dans 44 des 288 réserves forestières du Ghana.
Et d’après un rapport de Swissaid, le pays aurait perdu plus de 11 milliards de dollars en or de contrebande sur les cinq dernières années.
Une Victoire Symbolique
À Jema, la lutte dépasse la simple question économique.
Elle devient un acte de transmission, une volonté de préserver la nature pour les générations futures.
Entre solidarité, courage et engagement collectif, les habitants prouvent qu’il est possible de protéger l’environnement sans renoncer à l’espoir d’un avenir meilleur.
Leur combat inspire désormais d’autres communautés à travers le pays — rappelant qu’au Ghana, la véritable richesse ne se trouve peut-être pas dans les mines, mais dans la force du lien humain et la défense de la terre.

