Le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont publié un rapport particulièrement préoccupant sur les zones les plus exposées à l’insécurité alimentaire dans le monde. Treize régions y sont identifiées comme étant à haut risque, et cinq d’entre elles – dont trois situées sur le continent africain – font face à un danger imminent de famine, susceptible d’emporter des milliers de vies dans les prochains mois.
Soudan, une crise silencieuse d’ampleur dramatique
Miné par un conflit sanglant entre les forces armées régulières et les paramilitaires des Forces de soutien rapide, le Soudan est aujourd’hui au bord de l’effondrement humanitaire. Près de 25 millions de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë. Les déplacements massifs de populations, combinés à des entraves persistantes à l’acheminement de l’aide, précipitent certaines régions dans une situation de famine effective, selon les dernières observations du PAM.
Gaza, étranglée par les blocus et les combats
La bande de Gaza est désormais exposée à une menace de famine d’une gravité extrême. Les opérations militaires à grande échelle et les restrictions sévères d’accès entravent la distribution de vivres et de produits de première nécessité. L’écosystème humanitaire y est quasiment paralysé, aggravant de jour en jour les souffrances d’une population déjà exsangue.
Soudan du Sud, victime d’un enchevêtrement de crises
Le Soudan du Sud est confronté à une conjonction de menaces : instabilité politique chronique, risque élevé d’inondations et difficultés économiques persistantes. Selon les projections, près de 60 % de la population pourrait être en situation d’insécurité alimentaire aiguë entre avril et juillet. L’absence de mécanismes de résilience institutionnelle rend la situation d’autant plus préoccupante.
Mali, quand l’instabilité affaiblit les plus démunis
Dans un contexte de violences persistantes, notamment dans les zones rurales, le Mali voit les prix des denrées alimentaires s’envoler, mettant à rude épreuve les capacités d’adaptation des ménages les plus vulnérables. L’insécurité généralisée empêche également les réseaux humanitaires de fonctionner efficacement, laissant des pans entiers de la population livrés à eux-mêmes.
Haïti, prisonnière de la violence et de l’anarchie
Bien que situé hors du continent africain, le cas d’Haïti illustre une dynamique comparable. Les violences extrêmes perpétrées par des groupes armés désorganisent le tissu social et bloquent l’accès à l’aide humanitaire. Plus de 8 400 personnes déplacées seraient déjà confrontées à une insécurité alimentaire dite « catastrophique », selon les critères du PAM.
Le rapport met en évidence une double problématique : d’une part, la multiplication des restrictions d’accès à l’aide humanitaire, et d’autre part, un déficit de financement critique qui compromet gravement les capacités de réponse. Comme l’indique Jean-Martin Bauer, directeur de l’analyse pour la sécurité alimentaire au PAM :
« Cela signifie des rations réduites, et un nombre croissant de personnes privées d’une assistance pourtant vitale. »
Outre les cinq pays prioritaires, l’alerte concerne également des États comme le Yémen, la République démocratique du Congo, le Nigeria ou la Birmanie. En revanche, certains pays africains comme le Kenya, l’Éthiopie ou le Zimbabwe ont été retirés de la liste, signe d’une amélioration partielle mais encourageante de leur situation alimentaire.
Face à cette cartographie de la faim, le continent africain demeure au cœur de la tempête, pris en étau entre conflits armés, dérèglements climatiques et dépendance persistante aux importations alimentaires. La souveraineté alimentaire ne pourra être atteinte sans une volonté politique ferme, une stabilisation durable des territoires, et un investissement structurel dans la production locale.
