C’est une première en Afrique. Le Fonds monétaire international (FMI) a révélé l’existence d’une dette cachée d’une ampleur sans précédent au Sénégal. Près de 7 milliards de dollars auraient été accumulés entre 2019 et 2024 sous l’administration de Macky Sall — un chiffre qui, selon Edward Gemayel, chef de mission du FMI à Dakar, « n’a jamais été observé sur le continent ».
Cette découverte, faite dans le cadre des discussions pour la reprise d’un programme de prêt entre le Sénégal et l’institution internationale, a eu l’effet d’un choc. Après deux semaines d’échanges intensifs, aucune conclusion n’a encore été trouvée. Les discussions devront se poursuivre à distance, signe d’une situation plus complexe que prévue.
« Le cas du Sénégal, avec une dette cachée de cette importance, est inédit. C’est ce qui complique les choses », a déclaré Edward Gemayel à RFI.
Une Transparence mise à l’Épreuve
Pour le FMI, le problème dépasse les chiffres : il touche à la gouvernance financière et à la transparence budgétaire. L’institution demande désormais des « mesures correctrices » pour éviter qu’un tel scénario ne se reproduise. Parmi les conditions exigées : la centralisation de la gestion de la dette publique au sein d’un seul ministère, la publication des résultats de l’audit des arriérés, et un suivi rigoureux des engagements financiers.
L’objectif est clair : restaurer la confiance. Sans cela, il sera difficile pour le Sénégal d’obtenir un nouvel accord de prêt, pourtant crucial pour stabiliser son économie.
Une Situation financière Préoccupante
Les conséquences de cette dette dissimulée se font déjà sentir. En un an, l’agence de notation Moody’s a dégradé trois fois la note du Sénégal, évoquant des « risques croissants sur la trajectoire d’endettement » et une situation budgétaire préoccupante.
Aujourd’hui, la dette du pays représente 132 % du PIB, un niveau alarmant qui pèse sur les finances publiques et la capacité du gouvernement à financer ses politiques sociales et d’investissement.
Sans un nouvel accord avec le FMI, le Sénégal risque une période d’asphyxie financière, marquée par la hausse du coût de la dette et la difficulté d’accès aux marchés internationaux.
Entre Reprise et Confiance à Reconstruire
Malgré ces inquiétudes, le FMI se veut optimiste. Edward Gemayel rappelle qu’il est « rare qu’un nouvel accord soit finalisé après une première visite ». Les négociations devraient reprendre dans les semaines à venir, avec l’espoir d’aboutir à un compromis.
Mais au-delà des chiffres, cette crise met en lumière un défi de gouvernance : comment garantir la transparence financière dans un contexte de transition politique et de pression sociale croissante ?
Le Sénégal, longtemps cité comme un modèle de stabilité économique en Afrique de l’Ouest, doit aujourd’hui reconstruire la confiance — auprès de ses partenaires internationaux, mais surtout auprès de ses citoyens.

