Chaque année, des millions d’hectares de forêts disparaissent en Afrique subsaharienne. À Madagascar, les feux de brousse dévastent en moyenne 200 000 hectares par an, selon les ONG locales. En Afrique de l’Est, l’érosion emporte des milliers de tonnes de sols fertiles. Ces pertes ne sont pas seulement environnementales : elles représentent un coût économique colossal, souvent invisible dans les bilans officiels.
Des Milliards Envolés en Productivité Agricole
L’érosion des sols réduit la fertilité des terres, obligeant les paysans à défricher toujours plus pour maintenir leur rendement. Résultat : une spirale infernale où les surfaces cultivées augmentent, mais la productivité diminue. Selon la FAO, l’Afrique perd près de 4 milliards de dollars par an en productivité agricole à cause de la dégradation des sols. Dans des pays où plus de 70 % de la population vit de l’agriculture, cette hémorragie menace directement la sécurité alimentaire.
L’Energie du Bois : une Dépendance Coûteuse
La déforestation est alimentée par une dépendance massive au charbon de bois et au bois de chauffe. À Antananarivo, près de 90 % des ménages utilisent encore le charbon pour cuisiner. Cette dépendance entraîne une pression constante sur les forêts, qui se traduit par une perte de biodiversité mais aussi par un coût caché : l’augmentation des maladies respiratoires liées à la fumée, la raréfaction de l’eau, et la nécessité d’importer des solutions énergétiques plus chères à long terme.
L’Erosion Côtière : Menace pour les Infrastructures
Les pays insulaires et côtiers paient un tribut supplémentaire : l’érosion marine. Ports, routes et villages côtiers disparaissent sous la pression des vagues et du recul du littoral. La Banque mondiale estime que le coût de l’érosion côtière en Afrique de l’Ouest et dans l’océan Indien représente jusqu’à 5 % du PIB annuel de certains pays. C’est l’équivalent de plusieurs budgets nationaux engloutis par an.
Biodiversité sacrifiée, Tourisme fragilisé
Le capital naturel africain, qui attire chaque année des millions de touristes, est directement menacé. La destruction des habitats naturels réduit l’attractivité de destinations phares comme Madagascar, Maurice ou la Tanzanie. Or, le tourisme représente entre 7 et 12 % du PIB de ces pays. Chaque parc naturel détruit, chaque espèce disparue, c’est aussi une perte de devises et d’emplois durables.
Le Prix de l’Inaction
Derrière ces chiffres se cache une réalité implacable : ne rien faire coûte plus cher que d’agir. Les feux de brousse et la déforestation aggravent les inégalités, en frappant les populations rurales déjà vulnérables. L’inaction écologique est une dette silencieuse que l’Afrique contracte chaque année, et que ses enfants devront rembourser.
Un Futur encore Réversible
Investir dans la reforestation, l’agroforesterie, les énergies renouvelables ou la protection côtière n’est pas un luxe : c’est une assurance pour l’avenir. Chaque dollar investi dans la protection de l’environnement permet d’en économiser plusieurs en reconstruction et en pertes évitées. L’Afrique n’a pas les moyens d’attendre.Face à l’ampleur des pertes, l’Afrique — et plus particulièrement ses pays insulaires et côtiers — ne peut plus considérer la crise écologique comme une question secondaire. Les feux de brousse, la déforestation et l’érosion ne sont pas seulement des drames environnementaux : ils sont devenus des risques macroéconomiques au même titre que la dette ou l’inflation. Ignorer cette réalité revient à hypothéquer la croissance de demain et à fragiliser davantage les populations déjà vulnérables. L’urgence n’est plus de débattre de la nécessité d’agir, mais de décider comment investir rapidement dans des solutions durables, capables de transformer cette menace en opportunité pour le continent.
